Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
21 mars 2010 7 21 /03 /mars /2010 12:20
LE PERRUQUIER

 

 

 

 

Artisan de la mode, le perruquier est le factotum de l'art capillaire, "serviteur des grâces et de la beauté, par privilège du Roi".

Il est surtout présent en ville.

Il pratique un métier parfois prestigieux mais toujours éphémère.
 
Il est surtout en vogue aux 17ème et 18ème siècles.

Il fait partie de la même corporation que le barbier et le baigneur-étuviste.

Il coupe et frise les cheveux, fabrique et vend des perruques.

 

 

 

 

 

MICARMOR_6749_1217681522250_perruquier.gif

 

 

 

 

La profession se répartit entre:
  • les maîtres perruquiers qui tiennent boutique avec leurs garçons.
  • les chambellans qui pratiquent en chambre mais de façon clandestine.
  • les laquais, improvisés perruquiers auprès de leurs maîtres avec seulement le peigne et le rasoir en poche.


La perruque jusqu'au 16ème siècle signifie chevelure.


A cette époque, l'usage des fausses perruques est réservé aux vieillards des classes privilégiées, soucieux de cacher leur crâne.
Louis XIII atteint d'une calvitie précoce lance le port des cheveux postiches et introduit ainsi la fameuse perruque.

Tout le monde le suit : courtisans, clergé et gens de robe.
La Haute Société s'ensevelit la tête sous une montagne de cheveux artificiels.

On ne finira par retirer sa perruque que dans l'intimité.


images perr
Il y aura autant de degrés hiérachiques dans la perruque que dans la société :
  • A la royale pour Sa Majesté.
  • A la brigadière pour l' Armée.
  • A la moutonne bouclée pour les petites maîtresses.
  • A la robin pour les gens de robe.
  • A la sartine pour les magistrats.
  • A la trois marteaux pour les médecins.

 

 

Avec Louis XIV, le perruquier ne sait plus où donner de la tête.


Le Roi change de perruque pour chaque occupation de sa journée.

Tout est bon pour décorer les perruques, qui montent sur la tête comme un véritable édifice : plumes, fleurs, rubans, bijoux etc ....
Sous Louis XV et Louis XVI la mode continuera avec des allures variables.


Au milieu du 18ème siècle, toute la société porte la perruque : princes de sang, nobles, bourgeois, mais aussi, les artisans, les ouvriers et les domestiques.

                                    imagesCAOSEKSN.jpg  PERRUQUE.jpg

Comme la perruque coûte cher , elle est souvent vendue d'occasion et entraîne ainsi la transmission des maladies et des parasites.

La Révolution met fin à ces pastiches de toutes sortes.


La crise économique et les premières émigrations d'aristocrates font chuter la demande.
Puis elle s'effondra totalement quand les révolutionnaires déclareront la perruque comme symbole des anciens privilèges.


Les "têtes à perruque" désignent alors les vieillards et les personnes démodées. L'idéal esthétique va changer et le perruquier va se retrouver complètement désoeuvré.

 

 

 


LES PERRUQUIERS
(D'après un article paru en 1862)


Le perruquier pouvait se croire, sous Louis XV, d'une importance considérable. C'était son art qui semblait assigner à chaque personnage son rang dans le monde ; on se distinguait les uns des autres par la perruque : noblesse, tiers état, clergé, autant de degrés hiérarchiques de la société, autant de perruques diverses. Là ne se bornaient pas les attributions du perruquier : il était en rnême temps barbier, baigneur, étuviste. En un mot, il était le factotum de la toilette, le serviteur des grâces et de la beauté, par privilège du roi.

« La beauté que nous avons assignée à nos cheveux, dit un perruquier du dix-huitième siècle, est une beauté rare ; peu de personnes, surtout les hommes, se trouvent les avoir avec toutes les qualités nécessaires, dont voici les conditions, qui sont d'être raisonnablement épais et forts, d'une belle couleur châtain, plus ou moins foncée, ou d'un beau blond argenté, d'une longueur moyenne, descendant jusqu'à la moitié du dos. Il faut encore que, sans être crêpés, ils frisent naturellement, ou du moins qu'ils tiennent longtemps garnis. Les cheveux, en général, sont sujets à bien des accidents et des défauts qu'il fallait supporter ou du moins pallier avant que la perruque eût été imaginée. Plusieurs se trouvaient en avoir très peu ; il y a des maladies qui les font tomber ; ils se dégarnissent quelquefois sans aucune maladie apparente, de manière que non seulement les personnes âgées mais celles qui ne le sont pas encore, deviennent chauves avant le temps. Il fallait donc se résoudre à porter des calottes, coiffures tristes et plates, surtout quand aucuns cheveux ne l'accompagnent. Ce fut pour remédier à ce désagrément qu'on imagina au commencement du règne de Louis XIII d'attacher à la calotte des cheveux postiches qui parussent être les véritables. On parvint ensuite à lacer les cheveux dans un toilé étroit de tisserand, comme aussi dans un tissu de frangé qu'on nomme Le point de Milan. On cousait par rangées ces entrelacements sur la calotte même, rendue plus mince et plus légère ; pour cet effet, on se servait d'un canepin (l'épiderme de la peau de mouton), sur lequel on attachait une chevelure qui accompagnait le visage et tombait sur le cou : c'était alors ce qu'on appelle une perruque. » (Art du perruquier)

On faisait d'abord les perruques à tresses sur trois soies et cousues sur rubans ; puis on parvint à imiter complètement une chevelure naturelle. Cette découverte parut «si bonne et si secourable» qu'en 1656 le grand roi créa quarante-huit charges de barbiers perruquiers suivant la cour ; deux cents charges étaient établies en faveur du public. Un autre édit en ajouta deux cents autres en 1673.

La mode nouvelle fit sortir beaucoup d'argent de France ; il fallait se procurer des cheveux à l'étranger, la production indigène ne suffisant plus. Colbert s'émut de ces exportations de numéraire ; il voulut abolir l'effet dans sa cause et remplacer les perruques par des bonnets, dont on essaya même des modèles devant le roi. Les perruquiers se hâtèrent d'adresser au roi leurs doléances et représentations respectueuses : «L'argent sorti de France pour l'importation des matières premières y rentrait et au delà par l'exportation des produits manufacturés ; la ville de Paris fournissait de perruques l'Espagne, l'Italie, l'Angleterre, l'Allemagne et autres États».

Colbert abandonne le projet des bonnets, et les perruquiers grandirent en prospérité vers la fin du dix-huitième siècle, ils étaient au nombre de huit cent cinquante, avaient un prévôt, des gardes, des syndics, et charge héréditaire. «Ils ont droit et leur est attribué le commerce des cheveux en gros et en détail, comme aussi leur est permis de faire et vendre poudres, pommade, opiat pour les dents ; en un mot, tout ce qui peut servir à la propreté de la tête et du visage».

Le rasoir étant instrument de chirurgie, le chirurgien avait aussi le droit de faire la barbe ; mais sa boutique devait être peinte en rouge ou en noir, couleur de sang ou de deuil, sur laquelle se détachaient les bassins de cuivre jaune qui servaient d'enseigne ; le perruquier avait à sa porte des bassins blancs, en étain ; la fantaisie seule choisissait la couleur de sa boutique. Et comme lui-même était moins grave, moins pesant que le barbier chirurgien !


Comme il nous paraît, dans les estampes, apprécier tous les privilèges de son art : faire les cheveux aux dames, les étager de manière à leur donner un aspect agréable, combler les lacunes et les cacher sous des nuages de poudre ; fabriquer tours, toupets, chevelures entières pour messieurs les gentilshommes, gens de cour, d'église, de justice ou d'épée ; bref, débarrasser chacun des soins journaliers du corps !

Entrez dans cette boutique où travaillent les tresseuses, où l'on monte les coiffures préférées par les merveilleux, où l'on frise en crêpe, où l'on frise en boucles, où l'on répète les nouvelles que l'on sait, où l'on invente celles qu'on ne sait pas ; faites-vous mettre suivant votre condition, votre âge et la mode du jour, les cheveux en bourse en cadenette, en catogan, à la grecque, perruque à la Fotange, à la brigadière, en bonnet, nouée à l'oreille, d'abbé, de palais, à marteaux, à simple noeud, à queue de rubans, etc.; examinez cette collection d'outils : fers à friser (pince à longues branches à mâchoires plates en dedans), fers à toupet (à branche ronde entrant dans une creuse), cardes de toute sorte pour les cheveux, champignons à perruques, coquemard à faire chauffer l'eau, bouilloire, bouteille de fer-blanc pour porter l'eau chaude en ville, cornet à oeil de verre et masque à poudrer, melons (étuis à perruque), zeste (bourse à tuyau pour poudrer), etc., etc. ; regardez, écoutez, n'oubliez pas que cet artiste en cheveux est en même temps votre barbier, votre baigneur, qu'il descend peut-être du grand Binette (celui qui disait : Je dépouille la tête des sujets pour en couvrir celle du souverain) ; que peut-être vous vous trouvez dans la boutique de maître André, fabricant de perruques et de vers tragiques à la manière de ceux-ci :

En tel état que j'aille, à pied comme en carrosse, Il m'en souviendra du premier jour de mes noces.

Songez pour un moment qu'en vous faisant accommoder, vous entendez parler du récent ouvrage de M. Diderot ou de M. d'Alembert, ou même du chapitre de l'Encyclopédie sur les perruques, ou des dernières audaces de M. de Voltaire ; et comparez, si vous l'osez, la boutique du perruquier du dix-huitième siècle, avec celle du coiffeur du dix-neuvième. Figaro est mort ; son petit-fils n'a pas son esprit : il fait la barbe, taille les cheveux, coiffe au goût du jour et sait fabriquer des postiches sur tulle, imitant à perfection la nature ; mais aujourd'hui les hommes gardent leurs propres cheveux tant qu'ils peuvent. L'art des perruquiers serait en danger de se perdre chez nous sans les postiches et les fausses nattes à l'usage des dames.

Les travaux que l'on vient d'exécuter sur le quai de l'Horloge ont bien modifié l'emplacement qu'y occupaient, au dix-huitième siècle, par ordre, les perruquier en vieux. Ceux-ci ne rasaient point : ils n'étaient pas de barberie ; au lieu de bassins, ils avaient pour enseigne un marmot, espèce de vieille tête de bois avec une très-vieille perruque. Ils pouvaient. faire du neuf, mais à condition de mêler du crin aux vrais cheveux et de mettre au fond de la coiffe cette inscription : perruque mêlée.

C'étaient les perruquiers des pauvres gens.

Article paru sur La France Pittoresque

 

 


Partager cet article
Repost0

commentaires